Message écrit par Aneta Pavlenko.
Les scientifiques peuvent-ils regarder notre cerveau et prédire si certains d'entre nous réussiront plus que d'autres à apprendre une langue? Une étude récente publiée par le Journal of Neuroscience suggère qu'ils peuvent. Xiaoqian Chai et ses collègues de l'Université McGill utilisent l'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), une procédure de neuro-imagerie qui mesure les changements du niveau d'oxygénation du sang comme moyen de comprendre l'activité cérébrale (des niveaux plus élevés d'hémoglobines oxygénées activité). Cette procédure les aide à étudier les connexions entre différentes zones du cerveau qui se parlent dans le processus d'apprentissage et d'utilisation de la langue seconde (L2).
Pour voir si les différences individuelles dans la connectivité cérébrale peuvent prédire le succès de l'apprentissage de la L2, les chercheurs ont recruté 15 étudiants anglophones arrivés à Montréal d'autres provinces canadiennes, ainsi que d'Australie, du Royaume-Uni et des États-Unis. Français. IRMf a été utilisé pour mesurer la connectivité dans deux zones du cerveau: la région frontale gauche liée à la fluidité verbale et le cortex temporal-occipital ventral gauche, alias la zone de forme mot visuel, où les signes sur la page sont convertis en phonèmes et mots. Pour tester la fluence verbale et la facilité de lecture des participants, les chercheurs leur ont demandé de parler pendant deux minutes et de lire les passages à voix haute dans les deux langues.
Ensuite, les étudiants ont suivi un cours d'immersion en français intensif axé sur la lecture et les compétences conversationnelles requises pour une communication de niveau supérieur et qui a duré 12 semaines (6 heures par jour, 5 jours par semaine). Après la fin du cours, les chercheurs ont de nouveau testé la fluidité verbale, demandant aux participants de parler à nouveau pendant deux minutes en français et en anglais. Le nombre total de mots uniques employés correctement a été utilisé comme mesure de la fluence verbale (ils ont appelé cette récupération lexicale). Ils ont également demandé aux élèves de relire des passages et d'utiliser le nombre de mots par minute comme mesure de la fluidité de la lecture. L'analyse des performances en anglais L1 avant et après l'immersion n'a révélé aucune différence dans la récupération lexicale ou la vitesse de lecture. En L2 français, en revanche, les élèves ont fait des progrès significatifs, tant sur le nombre de mots uniques produits que sur la vitesse de lecture.
Les chercheurs ont ensuite corrélé les mesures de performance L2 avec la connectivité cérébrale au repos mesurée avant le cours de français et ont trouvé deux modèles intéressants. Les individus avec une connectivité plus forte entre la région frontale gauche et le gyrus temporal postérieur gauche (STG) montraient une plus grande amélioration du nombre de mots uniques produits (récupération lexicale) en L2 français, alors que les individus avec une connectivité plus forte Le STG moyen a montré une plus grande amélioration de la vitesse de lecture en L2 français.
Ces résultats ont immédiatement été rapportés par les médias comme une affirmation que certains cerveaux sont mieux câblés pour l'apprentissage des langues que d'autres. En fait, les choses ne sont pas aussi simples, comme l'ont montré les auteurs dans une autre étude publiée dans la même revue une semaine plus tard. Dans cette étude, ils ont de nouveau utilisé l'IRMf pour comparer la connectivité cérébrale au repos dans une région différente du cerveau – le gyrus frontal inférieur – et dans un groupe différent de participants. Cette fois, les participants étaient 16 bilingues simultanés français-anglais et 18 bilingues séquentiels, ces derniers ayant appris leur L2, soit en français ou en anglais, après l'âge de 5 ans. Les résultats ont révélé que dans les bilingues simultanés la connectivité entre les hémisphères cérébraux est supérieur à celui des bilingues séquentiels, qui semblent compter davantage sur l'hémisphère gauche.
Ces résultats soulèvent une possibilité intrigante que la connectivité peut être malléable, au moins dans certaines zones du cerveau, et l'expérience même de l'apprentissage d'une autre langue peut changer notre câblage interne, ce qui fait de nous de meilleurs apprenants. Pour confirmer cette hypothèse, les neuroscientifiques devront mener des études longitudinales, en suivant un groupe d'apprenants qui vont apprendre une langue jusqu'à ce qu'ils deviennent bilingues, alors restons à l'écoute.
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Photo d'une image par résonance magnétique (IRM) du cerveau de Shutterstock.
Les références
Berken, J., Chai, X., Chen, J.-K., Gracco, V., & D. Klein (2016) Effets du bilinguisme précoce et tardif sur la connectivité fonctionnelle au repos. The Journal of Neuroscience , 27 janvier 2016, 36, 4, 1165-1172.
Chai, X., Berken, J., Barbeau, E., Soles, J., Callahan, M., Chen, J.-K., et D. Klein (2016) Connectivité fonctionnelle intrinsèque dans le cerveau adulte et succès dans apprentissage de la langue seconde. The Journal of Neuroscience , 20 janvier 2016, 36, 3, 755-761.
Le site web d'Aneta Pavlenko.