En mars, j'ai assisté à une conférence fascinante à Genève sur les implications éthiques et sociales du Human Brain Project. Ce projet dépense un milliard d'euros sur 10 ans pour étudier comment fonctionnent les cerveaux, avec des applications à la maladie mentale et le développement de nouveaux types de robots ressemblant à des cerveaux. Plusieurs des éthiciens qui ont pris la parole à la conférence étaient préoccupés par les implications du projet pour l'idée traditionnelle du libre arbitre. Des progrès dans la compréhension des mécanismes cérébraux pourraient-ils aboutir à l'abandon de la croyance répandue que les actions des gens sont libres?
Dans un blog récent, j'ai affirmé avec audace qu'il n'y a pas de libre arbitre parce qu'il n'y a pas de volonté. J'ai récemment changé d'avis, parce que je vois maintenant comment les types de théories neurales que mes collègues et moi-même avons développés peuvent avoir de la place pour la volonté. Les actions qui résultent des processus neuronaux peuvent même être considérées comme libres dans un sens faible que j'appellerai «freeish».
La raison pour laquelle j'ai conclu qu'il n'y a pas de volonté est que notre nouveau modèle d'intention et d'action ne semble pas avoir de place ou de besoin dans la volonté. Les interactions de plusieurs zones cérébrales, telles que le cortex préfrontal, le cingulum antérieur et l'amygdale, produisent des actions sans aucun mécanisme ou opération qui implique la volonté. Mais j'ai récemment réalisé que combiner le modèle neuronal de l'intention et de l'action avec d'autres nouvelles théories neurales de l'émotion et de la conscience produit une manière de comprendre ce qui pourrait être.
Sur la vue élargie, la volonté est la capacité à faire des choix résultant de l'interaction de nombreuses zones du cerveau, qui sont toutes pertinentes pour comprendre l'intention, l'action, l'émotion et la conscience. Il est important de distinguer les actions automatiques des actions délibérées. Beaucoup de nos actions de routine sont en grande partie inconscientes, par exemple mettre un manteau en mettant une manche dedans puis l'autre. À l'autre extrême, considérons une décision que j'ai prise récemment concernant l'acceptation d'une invitation à prendre la parole lors d'une conférence en Inde. D'une part, je voulais visiter l'Inde et voir le Taj Mahal, qui est à Agra le site de la conférence. D'autre part, les deux vols dans chaque sens prendraient presque 24 heures et impliqueraient des quantités importantes de décalage horaire, coupant sévèrement dans mes plans sabbatiques pour écrire un livre sur le cerveau, l'esprit et la société. La décision de ne pas aller en Inde m'a pris plusieurs jours et a été basée sur une délibération consciente extensive, explicable en combinant des modèles neuronaux existants d'intention et de conscience.
Si la volonté existe comme ce genre de processus neuronal compliqué, est-ce gratuit? Évidemment, il n'est pas libre dans la façon dont les actions d'une âme immatérielle non matérielle sont supposées être libres, opérant indépendamment des forces causales. Ma décision de refuser le voyage en Inde avait de nombreuses forces causales fonctionnant aux niveaux neuronal et moléculaire. Cependant, conformément à l'approche compatibiliste (déterministe souple) du problème du libre arbitre, il est important de noter que ma décision n'a pas été affectée par la coercition externe, la maladie mentale interne et les fluctuations quantiques aléatoires. Plus positivement, ma décision exigeait beaucoup de délibération consciente par opposition aux comportements automatiques de routine. Par conséquent, je pense maintenant qu'il y a au moins quelques cas d'action humaine qui résultent d'une sorte de volonté qui mérite d'être appelée «freeish». La volonté de liberté ne sera peut-être pas tout ce que l'on peut vouloir d'un point de vue religieux, mais elle suffit pour permettre aux actions humaines d'être valables, significatives et responsables.