Qui es-tu vraiment?

Pourquoi des recherches psychologiques récentes suggèrent que, au fond, vous êtes vos valeurs.

La notion de «vrai moi» repose sur une distinction entre les éléments de votre psychologie qui font partie de ce que vous êtes vraiment et véritablement et des éléments de votre psychologie qui sont, pourrait-on dire, juste pour le voyage. Pour illustrer cette idée, pensez à un cas où vous avez été en conflit – par exemple, un moment où vous vous êtes empêché de donner suite à un désir qui vous a tenté. Pour moi, ça marche toujours d’imaginer le serveur me demandant si je voudrais un autre panier de frites en attendant mon repas. D’un côté, je suis attiré par mon désir de demander plus de jetons; d’autre part, je suis persuadé que je ne devrais pas faire le plein de collations. L’idée est que l’un de ces états psychologiques contradictoires – mon désir ou ma conviction – est interne à mon vrai moi, tandis que l’autre est externe. Celui-ci représente ma position réelle, ce à quoi je ressemble vraiment. L’autre est comme un étranger dans ma tête. C’est le mien dans un sens, mais dans un sens plus profond, ça ne l’est pas.

Breanna Schulze/Flickr

Source: Breanna Schulze / Flickr

Il existe divers comptes rendus sur ce qui fait la différence entre ce qui est interne et ce qui est extérieur à soi-même. Une image traditionnelle, avec des racines aussi anciennes que Platon, ressemble à ceci: vous êtes essentiellement identifiés à vos valeurs et capables de réfléchir à vos états psychologiques de leur point de vue. Le vrai moi, sur cette image, est un maillage entre vos valeurs et ces états psychologiques endossés de leur point de vue. Par exemple, un désir est interne à votre vrai moi s’il s’agit de quelque chose que vous valorisez. Je trouve cette image traditionnelle assez attrayante. Et l’une des raisons à cela est qu’il bénéficie de l’appui d’études psychologiques sur les jugements des gens sur le vrai soi.

Premièrement, il existe des preuves à l’appui de l’idée que vos valeurs constituent la perspective à partir de laquelle vous approuvez ou rejetez les états psychologiques. La principale conclusion ici est que nos valeurs affectent nos jugements sur le vrai soi des autres. En prenant les affiliations politiques comme des substituts des valeurs, les chercheurs ont constaté que les sujets libéraux et conservateurs exprimaient souvent des points de vue opposés sur la question de savoir si un état psychologique donné était interne à la personne elle-même. Par exemple, lorsqu’on leur présente une vignette sur Mark, qui croit que l’homosexualité est un péché mais qui se sent attiré sexuellement par les autres hommes, 57% des répondants libéraux estiment que les sentiments de Mark font partie de son vrai moi, mais pas de sa conviction. Seulement 26% des répondants conservateurs étaient d’accord. Cependant, lorsqu’on présente une vignette dans laquelle Mark est caractérisé en affirmant que l’homosexualité est moralement acceptable mais entretient des sentiments négatifs à l’égard des couples homosexuels, le schéma est inversé. Dans ce cas, 68% des répondants conservateurs ont estimé que les sentiments de Mark faisaient partie de son véritable moi, mais pas de sa conviction. Seuls 38% des répondants libéraux étaient d’accord. Le résultat est que les sujets étaient plus susceptibles de juger qu’un état psychologique faisait partie du vrai soi de Mark quand ils pensaient que cet état était bon que lorsqu’ils pensaient que c’était mauvais. Cela suggère que l’image traditionnelle est correcte pour affirmer que nos valeurs sont le point de vue à partir duquel nous formulons des jugements sur le vrai soi.

Un deuxième élément d’appui au tableau traditionnel provient d’une série d’études portant sur les jugements concernant l’identité dans le temps. Les résultats suggèrent que les gens croient que la persistance dépend davantage de la continuité des traits moraux que de toute autre caractéristique psychologique ou corporelle. Dans une étude, les sujets ont été invités à envisager un scénario dans lequel ils voient une connaissance qu’ils connaissaient à 25 ans pour la première fois en 40 ans et à évaluer le degré de modification réelle d’un tel changement entre-temps. Les modifications apportées au caractère moral d’une personne (par exemple, devenir raciste, devenir cruel, devenir honnête, devenir généreux) ont été jugées avoir plus d’impact sur le vrai soi que des modifications de la mémoire, de la personnalité, de la cognition, des préférences ou de la perception. D’autres études corroborent ces résultats. Pris ensemble, ces résultats suggèrent que nos jugements sur la persistance des personnes dans le temps se concentrent sur des éléments d’évaluation de leur caractère général.

En résumé, nous avons un ensemble de résultats qui suggère que le point de vue à partir duquel nous formulons des jugements sur le vrai soi est évaluatif et un autre ensemble de résultats qui suggère que l’objet de ces jugements est évaluatif. En ce qui concerne le vrai soi, nous avons tendance à porter des jugements sur les valeurs du point de vue des valeurs. Cela correspond bien à l’image traditionnelle.

Pour être juste, l’appui de la littérature psychologique à la conception traditionnelle du vrai soi, fondée sur des valeurs, n’est pas tout à fait décisif. D’une part, il n’est pas clair que la même notion de valeurs est en jeu dans toutes ces études. Penser que quelque chose est bon ou mauvais n’est pas exactement la même chose que penser qu’il est moralement bon ou mauvais. D’autre part, l’affiliation politique n’est pas un indicateur parfait des valeurs. Tous les libéraux n’ont pas les mêmes valeurs, pas plus que tous les conservateurs. Ces questions devraient être explorées dans les travaux futurs. Mais les jugements des gens ordinaires semblent appuyer l’opinion du philosophe traditionnel selon laquelle vous êtes vos valeurs et ces états psychologiques qui s’y alignent.