Sur la honte de la valorisation

Un collègue a posté un commentaire sur mon précédent article de blog, "The Shame Family", et je pense que ce commentaire mérite une discussion plus large car il contient des idées fausses qui sont omniprésentes dans les domaines de la santé mentale et de notre culture. Voici son commentaire:

Vous citez Sartre sans une explication complète de son propos. Après tout, son exemple est l'expérience d'un homme regardant à travers un trou de serrure à une femme nue qui prend soudain conscience qu'il est observé. La personne dans la honte est «attrapée» en levant la moitié, en regardant vers le bas. Nous sommes alarmés à juste titre par des individus qui sont «éhontés», qui refusent le regard de l'autre et se placent en dehors du contrôle social que le regard crée. Votre description de la honte ne se déplace que dans une direction, à savoir la personne humiliée comme «victime». Mais le refus d'accepter que quelqu'un est vulnérable, que quelqu'un est «faible» (donc humain) est souvent une résistance significative en thérapie. La capacité de traverser la honte, de se repentir comme Job "dans la poussière et les cendres" en présence de l'autre, est une partie vitale de la croissance émotionnelle. Votre observation que dans la honte, «nous appartenons, non à nous-mêmes, mais à eux» est certainement correct, mais votre conclusion que cela conduit au développement d'un soi «inauthentique» n'est qu'un résultat possible. L'enfant grandit par la honte à une plus grande conscience de son monde social. Une grande partie du travail en thérapie consiste à permettre au patient de ressentir tout l'impact de la honte en présence du thérapeute et de récupérer les aspects du moi qui sont séparés. La honte, comme c'est le cas pour tous les affects, a des implications à la fois positives et négatives pour le développement émotionnel. "

Ce commentaire me semble erroné de plusieurs façons. Je ne pense pas que cette honte, qui ne favorise que le respect et l'accommodement pathologique, ait des implications développementales positives, et je pense que l'affirmation selon laquelle elle le fait découle de l'absence de distinction entre la honte morale et la culpabilité. Le voyeur de Sartre a honte d'être vu, pas de culpabilité de violer la femme nue. La vraie repentance appartient à la culpabilité, pas à la honte. Se repentir de la honte est une repentance inauthentique. Se repentir d'être vulnérable, par exemple, est absurde. Nous devrions être beaucoup plus alarmés par les gens qui sont innocents que par ceux qui sont éhontés. Les sociopathes, peut-être comme le voyeur de Sartre, sont innocents et non impudiques. En bref, je pense que le commentaire de mon collègue a complètement faussé la phénoménologie émotionnelle!

L'idée que la honte est essentielle à la conscience sociale et à la socialisation est l'un des grands mythes destructeurs et largement incontestés de notre culture. C'est la socialisation par coercition – honte à l'enfant et briser sa volonté! Qu'en est-il du rôle essentiel de l'harmonisation empathique et de la compréhension émotionnelle dans le processus de socialisation? Dans le récit de Sartre, c'est seulement en expérimentant l'objectivation et la honte que nous prenons conscience de l'Autre. Il n'y a pas de place dans la philosophie de Sartre pour le rôle vital de l'expérience d'être compris ou aimé pour soi-même.

Ce n'est tout simplement pas le cas que tous les affects ont «des implications à la fois positives et négatives pour le développement émotionnel». Mon collègue peut-il trouver des implications positives sur le développement de sentiments d'humiliation angoissante, d'horreur et de terreur, par exemple? Les personnes qui sont soumises sans relâche à de telles expériences dévastatrices dans l'enfance peuvent devenir elles-mêmes des auteurs ou des tueurs de masse. Quand la honte ou l'humiliation apparaît dans la relation thérapeutique, le but est de relâcher l'emprise de tels sentiments, de ne pas les utiliser pour rendre le patient plus conscient de l'altérité du thérapeute!

La valorisation de la honte au nom de la conscience sociale et de la socialisation est trop souvent une rationalisation pour abuser émotionnellement des jeunes enfants.

Copyright Robert Stolorow