Redéfinir les conséquences du suicide

Les survivants du suicide méritent une voix et un meilleur accès aux ressources.

Par Amber Champagne, collaboratrice invitée

Lorsque nous parlons de suicide, c’est souvent dans le contexte des facteurs qui ont conduit à l’événement et de la manière dont il aurait pu être évité. Il est important de comprendre ces signes avant-coureurs, mais ce recul peut être préjudiciable et accroître le sentiment de culpabilité chez ceux qui ont perdu un être cher au suicide. Je sais — je suis un “survivant du suicide” qui pense que nous devons accorder plus d’attention à des personnes comme moi qui traversent une lutte tout à fait distincte.

Le terme «victime de suicide» est souvent utilisé dans les articles d’autoassistance pour désigner les personnes laissées pour compte par quelqu’un qui se suicide. Ce terme est exact au lendemain de la perte de quelqu’un, car tout ce que vous pouvez réellement faire est d’essayer de survivre au jour le jour. Au début, survivre semble impossible, mais avec le temps, vous survivez un peu plus longtemps et vous commencez à vous rendre compte que vous devenez un peu plus fort. Ceci, associé au soutien d’amis et de la famille, pourrait être tout ce dont vous avez besoin.

Amber Champagne, used with permission

Source: Amber Champagne, utilisé avec permission

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Source: Amber Champagne, utilisé avec permission

Pour ceux d’entre vous qui n’ont pas perdu un être cher au suicide, je prie pour que vous n’ayez jamais à endurer ce que j’ai vécu – la perte soudaine, le choc, la douleur, les questions sans fin. Au début, le temps avance lentement. Tout est brumeux autour de vous. Les gens qui ont de bonnes intentions vous diront qu’ils comprennent votre perte, mais ils ne le font pas – comment pourraient-ils? Je me demande souvent en quoi ma vie pourrait être différente. Serais-je encore où je suis aujourd’hui? Aurais-je été aussi motivé pour poursuivre mon doctorat en psychologie clinique? Mais surtout, je souhaite que mon père soit présent pour les vacances et les célébrations. Je me trouve à vouloir l’appeler et le tenir au courant de ce qui se passe dans ma vie.

Le monde était meilleur avec lui. Il était désintéressé, ambitieux, intelligent, aventurier et passionné. C’était quelqu’un qui a profité au maximum de sa vie et ne s’est jamais excusé, malgré les épreuves qu’il a endurées. Je crains qu’il ne soit oublié parce que le monde continue de bouger. Beaucoup de gens comme mon père deviennent un lointain souvenir et le visage d’une tragédie oubliée.

Si j’ai appris une chose après avoir perdu mon père, c’est que le deuil lié au suicide ne respecte pas les règles. Il n’y a pas de calendrier parce que ce n’est pas naturel et soudain. Les étapes du deuil (colère, déni, dépression, négociation et acceptation) ne semblent pas tout à fait correspondre. Certains jours, vous êtes sans espoir. Certains jours, votre colère est dirigée contre votre bien-aimé, d’autres jours, vous êtes en colère contre vous-même ou votre famille. Vous pourriez même blâmer le monde (leur travail, l’hôpital, leurs médecins) d’avoir poussé votre proche par-dessus bord. Quelque chose d’assez insignifiant peut vous amener à vous désagréger. Chaque événement négatif après cette perte peut s’accumuler et vous enterrer un peu plus profondément, même si votre perte s’est produite il y a des années.

Je me suis souvent demandé s’il y avait d’autres personnes comme moi avec un chagrin compliqué qui semblait ne jamais se dissiper. Il est difficile de trouver cette information en tant que psychologue clinicien en formation. Je ne peux donc qu’imaginer à quel point il est difficile à trouver pour le grand public. D’innombrables livres passent sous silence les signes avant-coureurs de suicide, mais il n’y a pas de ligne directrice facilement disponible pour me dire combien de temps mon chagrin pourrait durer ou ce que pourrait être l’avenir. Les victimes de suicide peuvent se sentir isolées dans leur chagrin et leur traumatisme complexes sans satisfaire pleinement aux critères de diagnostic. La perte peut sembler récente peu importe le temps qui passe.

Les victimes de suicide ont besoin d’un guide et d’une source d’information qui les conduira à une forme d’acceptation. L’acceptation peut sembler différente d’un survivant au suicide à un autre, mais il s’agit d’un exploit important, car elle implique de composer avec cette perte et d’abandonner le blâme. Il est possible d’accepter et de reconnaître logiquement ce qui s’est passé. Mais comment pleurez-vous quelqu’un qui est également responsable de sa mort? Je pense que l’essentiel est de ne pas laisser cette perte te dévorer. Le suicide est plus compliqué et il est normal de s’y sentir ambivalent.

En attendant que ce type de guide soit mis en place, j’espère que mes pensées ici pourront servir de ressource pour les survivants du suicide. Je veux encourager les survivants du suicide à parler de leurs proches. Ne vous sentez pas comme un fardeau pour les autres ou ne les mettez pas mal à l’aise. Gardez leur mémoire en vie. Traitez vos sentiments en constante évolution.

Pour ceux qui ont des amis ou des proches survivants du suicide: je vous encourage à écouter. Ne parlez pas pour combler le silence; ne pensez pas à la façon dont vous allez réagir. N’essayez pas de le réparer, car vous ne pouvez pas. Essayez d’être pleinement dans le moment avec cette personne pour comprendre comment leur monde a changé. Ces conversations ne sont pas de sympathie ou de réconfort. Ils n’utilisent pas cette perte comme une «béquille». Ils en parlent pour préserver la mémoire de leur proche. Les survivants peuvent craindre d’oublier leur être cher comme le font leurs proches. Aux amis et à la famille, je vous encourage à poser des questions sur cet être cher. N’ayez pas peur de contrarier cette personne, car il est probable qu’elle pense à leur perte plus souvent qu’autrement. Croyez-moi, cela les préoccupe déjà.

Je veux être quelqu’un avec les réponses pour aider à donner un sens au suicide, mais comme beaucoup d’autres, je ne peux pas. Je peux dire que vous n’êtes pas seul. Vous allez passer à travers cela. Vous aurez vos bons et vos mauvais jours au fil des ans, et ce n’est pas grave. Il n’existe pas de manière «normale» de faire face à votre perte. Faites de votre mieux pour en parler et ne craignez pas de mettre les autres mal à l’aise. Mettre fin à la stigmatisation. Si vous pouvez survivre au suicide, vous pouvez survivre n’importe quoi.

Amber Champagne est une étudiante diplômée du William James College, un chef de file en matière d’éducation de la prochaine génération de professionnels de la santé mentale.